La profession infirmière est-elle essentiellement féminine ? (3/3)
De l’Antiquité à l’époque moderne, le métier d’infirmière est considéré comme une profession essentiellement féminine. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à observer la féminisation du terme ; mécanisme que l’on rencontre peu (et lorsque c’est le cas, de manière très moderne) dans le cadre d’autres métiers. Or, cette féminisation accrue s’explique tout à la fois par une association intrinsèque du soin à la Mère et par les premières avancées féministes. S’octroyer une profession qui leur serait réservée de fait permettait aux femmes non seulement de se construire un statut, mais également d’acquérir une certaine indépendance à l’époque où celle-ci leur faisait cruellement défaut. Autant de conjonctures qui expliquent qu’encore aujourd’hui ; l’on compte de nombreuses femmes dans les rangs infirmiers. Or, si le terme « infirmier » est aujourd’hui plus commun qu’au XIX ème siècle ; qu’en est-il de la représentation masculine dans cette profession ? A vrai dire, celle-ci (bien qu’existante) connaît bien des déboires. Car la profession infirmière est incontestablement l’un de ces métiers où l’on constate des disparités d’accès dues au sexe. Mais, petite originalité, ce sont ici les hommes qui sont mis sur le banc de touche …
Une misogynie inversée encore bien présente au XXIème siècle
En effet, cette dévolution quasi exclusive des soins infirmiers aux femmes a laissé des traces. Et si les candidats hommes ne manquent pas, ils ont pourtant du mal à se faire accepter. Par les patients en premier lieu puisque les femmes (et d’autant plus les personnes âgées) peuvent parfois refuser qu’un infirmier de sexe masculin fasse leur toilette. Tandis que les hommes peuvent être déroutés par cette figure masculine dans un domaine qui leur a toujours été présenté comme essentiellement féminin. Pourtant, les infirmiers ne se révèlent pas moins compétents ou humains que leurs collègues féminines. Plus encore, celles-ci apprécient leur présence et leur concours peut être précieux ; notamment lorsqu’il s’agit de soulever un malade en surpoids. Cependant, ce bouleversement inquiète et interroge. A l’image des femmes dans de très nombreux corps de métiers, ce sont ici les hommes dont la présence n’est pas considérée comme naturelle. Et ce en dépit de tout ce qu’ils ont à apporter à la profession. L’infirmier au masculin est encore victime de siècles de préjugés et d’une construction sociétale basée sur la discrimination sexuelle.
Une situation regrettable, qui fort heureusement sera amenée à changer au fil du temps. Au 1er Janvier 2019, la France comptait quelques 96 763 infirmiers. Un nombre certes encore faible au regard des 625 809 infirmières que recensait alors le pays. Cependant, cela pourrait être le début d’une belle embellie. Les changements relatifs à la paternité (pères au foyer, instauration d’un congé paternité) pourraient du reste jouer en ce sens, puisqu’ils concourent à redonner au masculin un rôle à jouer dans le domaine du soin à la personne. Secteur dont l’Histoire et les mœurs l’avaient auparavant exclu.
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